La spirale infernale du low-cost

on 5 mars 2013 | 11 Comments

Jusqu’ici, le low-cost et tout ce qui peut s’acheter à un prix bon marché a plutôt bonne presse : il est vu comme un moyen pour l’ensemble de la population, y compris les plus pauvres, d’accéder à la société de consommation comme n’importe qui. Petit à petit s’est glissé dans la conscience collective comme un droit à la consommation : tout citoyen, quelle que soit sa condition ou son revenu, aurait un droit naturel à consommer, les sociétés de crédit jouant là un rôle prépondérant.

Le low-cost ou l’illusion de l’égalité

Pour augmenter le pouvoir d’achat d’une population, il y a deux méthodes : la première est d’augmenter les revenus des gens ; la seconde est de diminuer le prix des biens. Il semble que nous ayons opté depuis quelques décennies pour la seconde méthode, et ce n’est pas sans conséquences : la course à la baisse des coûts a entraîné celle à la baisse des salaires (on parle de compétitivité), à la délocalisation là où le « coût du travail » est plus attractif, et par la même occasion, au chômage de masse, entraînant lui-aussi baisses de revenus, et donc besoin encore plus important de baisses de coûts, et cætera, et cætera.

lowcost

Ce cercle vicieux de l’illusion du low cost devient de plus en plus difficilement supportable. Sous l’aspect de l’accès universel aux biens de consommation, il maintient une barrière entre ceux qui peuvent se permettre de consommer des biens de qualité – les plus aisés – et ceux qui doivent se contenter de biens de piètre qualité. L’actuel scandale de la viande de cheval en est l’illustration la plus crue : qui peut se permettre d’acheter sa viande dans des boucheries de qualité et qui aura les moyens de se donner le temps de cuisiner « maison » n’aura rencontré aucune difficulté.

Tirer la société vers le haut, tourner le dos au low-cost

Le low-cost est à la fois dommageable pour le bien-être économique du pays, car il tire le niveau de vie vers le bas – et personne ne sait où ça s’arrêtera – et également dommageable pour la santé publique et l’intégrité financière de ceux qui deviennent surendettés. Alors, peut-être est-il temps de réfléchir à l’envers, et de reconsidérer que le niveau de vie doit s’améliorer par la qualité de vie et le progrès.

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11 Responses to “La spirale infernale du low-cost”

  1. 5 mars 2013

    gillesri Répondre

    Vous avez bien raison de fustiger cette spirale vers le bas qui détruira les pays développés si nous n’y prenons garde.
    Restons optimiste et espérons un sursaut de survie.

  2. 6 mars 2013

    Alex Répondre

    Article interessant.

    Le low cost est l’entreprise à la mode du moment. L’objectif est de baisser les prix pour tous avec un minimum de qualité.
    Néanmoins je me pose certaines questions d’ordre économique.

    Quel est le réel prix d’un produit ou d’un service ?

    A l’heure actuelle, je me pose des questions sur la filiale Low cost de la SNCF Ouigo.
    Pour un trajet Paris Marseille:
    – 70 euros avec SNCF
    – 15 euros avec OuiGO

    La différence m’incite à prendre beaucoup plus le train.
    Est ce vraiment une regression de ma qualité de vie ?
    Pour moi bien au contraire car je me déplace avec un moyen transport écologique, rapide et convivial.
    Sur le concept OuiGo, un poubelle par wagon, des fauteuils simples, absence de wagonsbar, contrôle à quai, augmentation du nombre d’aller retour capitale/grande ville, sont les grands changements .

    J’aimerais bien connaitre votre avis car d’un coté on ne peut pas demander à la société de réduire l’impact de nos déplacements et de l’autre laisser des prix exorbitants pour se déplacer de manière écologique.

    • Bonjour,

      Votre question est tout-à-fait pertinente ! Comme pour toute chose, la vérité n’est jamais ni toute noire, ni toute blanche.

      Je ne sais pas comment la SNCF construit cette offre low-cost d’un point de vue social, mais il me semble que le personnel est fortement réduit (ici, on ne délocalise pas, on dégraisse tout simplement). Mais au-delà de ça, effectivement, si cette offre consiste juste en une baisse de qualité de service sur un transport en commun, pourquoi pas.

      Cela dit, je pense aussi que la SNCF parie sur le long terme, car son offre est pour le moment déficitaire pour quelques années. Bref, elle casse les prix en vendant à perte en prévision de l’arrivée prochaine de la concurrence. Votre boucher n’aurait pas le droit de faire la même chose.

      En conclusion, comme dans toute offre low-cost, il y a de la casse sociale, même si, ici, la SNCF perd clairement sur sa marge.

      • 6 mars 2013

        Alex Répondre

        La SNCF prépare sa stratégie avant l’ouverture à la concurrence en 2019.

        D’un point de vue social, les employés de la SNCF ne vont pas malheureusement vers une avancée de leur condition de travail. C’est dans ce cas là les inconvénients de ce changement de politique en privilégiant le low cost même si d’après Guillaume Pépy , les salariés n’ont pas de soucis à se faire.

        Néanmoins, le fait de rendre le TGV plus accessible financièrement est une des solutions les plus efficaces si l’on veut réduire notre empreinte sur la planète.
        A 15 euros, je n’hésite pas entre la voiture et le TGV contrairement à 70 euros où prendre le train devient plus cher que la voiture.

        Si on rentre dans une discussion plus large, ce type d’emploi dans les transports a-t-il un avenir ?
        En regardant les autoroutes, le métro, les avions , l’utilisation des nouvelles technologies engendrent obligatoirement un dégraissage du personnel qui me semble inéluctable.

        D’où l’idée de revoir les modalités de travail permettant de s’adapter à ses nouvelles technologies. (diminution du temps de travail, création de nouveaux emplois,…)

        • C’est tout à fait vrai. Mais attention à ne pas faire l’amalgame entre progrès technique et recherche de baisses de coûts. Ce n’est pas le progrès technique qui permet à la SNCF de baisser ses tarifs car un TGV est plus cher qu’un vieux Corail et le gain ne se situe que sur la baisse des services et non leur automatisation.

          • 6 mars 2013

            Alex

            Malheureusement, le manque de transparence crée un problème notamment la non-connaissance du coût d’un TGV.

            Il est souhaitable d’avoir un système qui permette à l’entreprise de vivre et non de s’enrichir. Dans ce cas là, malheureusement nous ne pouvons être informés.

            L’exemple des autoroutes est révélateur d’un entreprise qui s’enrichit. La diminution de personnel est sur 6 ans de 1400 salariés. En enlevant le coût de ces salariés, l’entreprise s’enrichit sur le long terme.
            Il aurait été possible de garder les salariés et de rester dans une entreprise viable.

            La question est toujours la même Quel est le juste prix à payer pour qu’une entreprise soit viable (et non s’enrichisse)?

  3. 6 mars 2013

    David Répondre

    « Petit à petit s’est glissé dans la conscience collective comme un droit à la consommation »
    Je ne suis pas d’accord. On ne peut jamais consommer qu’à hauteur de ses moyens. Le low cost le permet pour ceux qui ont le moins d’argent. Les entreprises de crédit à la consommation (ces usuriers) tentent de les pousser à consommer au delà de leurs moyens. Je crois pas que les gens pensent qu’ils on « le droit » de consommer plus que ce qu’il peuvent se permettre.

    « il y a deux méthodes : la première est d’augmenter les revenus des gens ; la seconde est de diminuer le prix des biens. Il semble que nous ayons opté depuis quelques décennies pour la seconde méthode »
    Je ne suis pas d’accord non plus. Je pense qu’en France, l’état essaie d’appliquer la première solution (tant bien que mal et très compliqué en temps de crise) et que les entreprises essaient d’appliquer la deuxième. Je voyage low cost et j’en suis très content. La bouffe n’est pas très bonne, les sièges ne sont pas très confortable, mais je ne m’attend pas à mieux.

    Je pense que oui le low cost supprime des emplois (souvent peut qualifiés) mais par la même occasion, tire la croissance de certains secteurs. Notamment celui des systèmes d’informations qui fournit à des entreprises des outils d’optimisation de leur productivité. Un secteur dynamique qui crée des emplois…
    Après, il faut s’assurer que dans le processus de réduction des coûts, ils ne franchissent pas la ligne réglementaire/légale.

    Faire un « procès » au low cost, en soi, n’a pas de sens pour moi. Ce sont des entreprises comme les autres (voire plus lucratives). Ce qu’il faut sanctionner ce serait plutôt les « dérives » que pourraient entraîner la réduction à l’extrême des coûts. Mais ça, il n’a pas fallu attendre les low cost. Des grandes entreprises non-premiers-prix sont les champions de ces dérives : Société générale, France Télécom, British Petrolium…

  4. 7 mars 2013

    FeF Répondre

    Belle analyse. Une société low cost vs une société vivant d’opulence. Et au milieu une classe moyenne qui s’effrite… La corde finira par rompre…

  5. 11 avril 2014

    Dominique Répondre

    N’oubliez pas non plus que le low-cost (ou plutôt le low-price) s’applique également à la téléphonie mobile.
    Je suis chez B&Y, je paie mensuellement 3€ pour 2h et j’en suis très satisfait, car dans un passé pas si ancien (époque pré-FreeMobile), ce forfait de 2h se payait 10x plus cher, 30€
    Le différentiel ainsi récupéré (30-3)*12= 324€ sont dépensables ailleurs ou placés sur un livret.
    L’arrivée d’un 4ème opérateur a obligé les 3 autres à revoir leurs tarifs, qui ont menacé de supprimer plus de 10000 emplois.
    Pourquoi pleurer sur ces 10000 emplois quand on sait que durant des années, les 3 gros se sont goinfrés sur le dos des clients ?
    Facile de prendre les emplois en otage quand l’entente est cassée !

    • 20 avril 2014

      Custin d'Astrée Répondre

      La différence est que le produit téléphonique low cost est de qualité équivalente au produit non low cost. La différence de prix ne s’est pas faite sur la qualité, mais sur la marge. Ce sont deux stratégies économiques différentes, mais les produits sont les mêmes.

  6. 29 novembre 2014

    PERRET Répondre

    Nous sommes passé d’une économie du produit à une économie du prix. A ce jour, le consommateur achète un prix et non un produit sauf pour le luxe, ou quand il fait un excès de stupidité (ex Nespresso). Comme toujours, il faut se garder d’entrer dans un débat manichéen ou chacun défend son camps. Cela ne même à rien. Surement l’ego de l’homme qui le pousse à avoir raison au lieu d’avoir un raisonnement juste. Ici le débat, comme tout débat de société englobe de nombreux aspects et est donc complexe dans son approche.
    Le « low cost » peut être bénéfique comme pour la téléphonie avec la baisse des prix. Ici une parenthèse. Concernant la téléphonie, le terme « low cost » est un abus de langage. Il s’agit ici d’un retour à la moyenne bien connu des financiers où les marges étaient exagérément hautes. Le jeu de la concurrence à fait son œuvre. D’un coup, le « gauchiste » qui ne paye plus que 3 euros/mois son forfait est réconcilier avec les lois du marché. Pas si mauvais ce capitalisme. Parenthèse fermée. Ceci étant, la pression exercée sur le prix, (duquel découle le low cost) par le prolos du coin car il n’a plus une tune pour vivre décemment crée trop souvent des emplois de merde et des produits tout aussi merdique. Bref la nouvelle pauvreté. Cela reste un choix de société, un choix de mode de vie. Manger de la viande de porc coupée à l’eau et la chimie tout les jours, ou une pièce de boeuf 2 fois par semaine. Il y a encore beaucoup à dire. Le débat reste bien entendu ouvert. L’essentiel est de sortir un moment la tête du guidon et de prendre du recul. Ensuite il faut agir. Nous sommes tous responsable de la situation. Ce mode vie est choisi et non subi.

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